la porte ouverte -25-
Nous partîmes sous la protection de l’armée, juste au moment ou des fellagas armés venaient nous rendre une visite amicale, je suppose !
Chacun dans notre famille se débrouilla pour partir comme il le pouvait, presque tous avaient des enfants, mais la famille éclata à ce moment là, qui était notre « sauve qui peut » à nous. Il y a tant de cousins que je n’ai pas revus depuis, et qui sont devenus des étrangers pour moi, par la force des choses.
La famille de ma tante Rosette suivit le même trajet que nous dans le Nord, et nous eûmes grâce à eux encore un semblant de famille pas trop loin les uns des autres. Lorsque nous étions à Berck, dans la maison qu’on nous avait prêtée, ce fut la famille de tonton René qui vint chercher asile chez nous. Il ne restèrent pas longtemps, mais une autre cousine les accompagnais, Denise, et je me souviens avoir entendu dans la bouche de ma mère : « Elle a les petits pieds dans les grands » mais je ne compris le sens de cette phrase que longtemps après.
C’était jour de fête lorsque nous nous rencontrions avec nos cousins du même âge que nous, mais à qui nous avions donné des surnoms par lesquels je les appelle encore aujourd’hui, oubliant presque leur vrai prénom. Un jour, j’ai vu mon cousin Titou et je l’ai appelé comme je le fais depuis des années. Et là, j’appris qu’en fait j’étais la seule dans sa famille à continuer à utiliser le surnom d’autrefois. Ma cousine Béatrice reste ma cousine préférée, presque l’amie que je n’ai jamais eue. Elle a toujours été là dans les circonstances difficiles de ma vie et je l’en remercie.
Je voudrais à la mémoire de tous ceux de chez nous, chrétiens ou musulmans écrire notre chant à nous, qui n’a rien à voir avec la marseillaise (le sang impur qui abreuve vos sillons, est-ce le nôtre ? ) Notre chant est un chant d’amour pour un pays que nous pensions être le notre, Je suis la quatrième génération née française. Il existe encore dans le cœur de la dernière génération dont je fais partie, mais bientôt, il n’existera plus du tout de pied noir, cela devrait en réjouir plus d’un. Ce n’est pas une nationalité, c’est bien autre chose à laquelle les années 1962 ont mis fin. Il y eut le dernier des mohicans, et il y a nous, les derniers pied-noirs ! hors sujet, pas vrai !
Nos descendants seront français, rien de plus, mais une branche de leur famille a été coupée. J’espère que l’on ne leur demandera pas trois générations en cas de conflit, comme cela s’est produit dans un sombre passé pour d’autres.
Notre hymne
C’est nous les africains qui revenons de loin
Nous venons des colonies pour sauver le pays
Nous avons tout quitté, parents, amis, foyers
Mais nous gardons au cœur une invincible ardeur
Car nous voulons porter haut et fier
Le beau drapeau de notre France entière
Et si quelqu’un venait à y toucher
Nous serions prêt à mourir jusqu’au dernier
Battez tambour ! A nos amours !
Pour le pays, pour la patrie ! Mourir au loin,
C’est nous les Africains !
Et lorsque finira la guerre
nous retournerons dans nos gourbis
le coeur joyeux et l'ame fière
d'avoir libéré le pays
en avant, en chantant, en marchant
c'est nous les Africains